Transsibérien, de Vladivostok à Paris

Vladivostok

Quand les Coréens nous disaient qu’ils allaient à Vladivostok pour avoir un petit goût d’Europe pas trop loin de chez eux, cela nous faisait sourire tellement nous nous faisions une image de bout du monde de cette ville. Et pourtant, avec ses bâtiments de style XIXème aux tons pastel, jaune, rose ou vert ornementés de décorations ou de colonnades blanches, certaines rues de Vladivostok ont un air néo-classique qui pourrait rappeler Sofia ou Budapest.

Vue d’avion, Vladivostok semble toute petite, perdue dans sa péninsule au milieu des immenses étendues boisées d’un côté et de l’Océan Pacifique de l’autre. En nous approchant du centre où se trouve notre hôtel, nous sommes vite pris dans des bouchons, malgré la largeur des avenues. Les panneaux et les affiches sont en cyrillique, les pizzas sont à des prix raisonnables et les personnes aux yeux bridés sont principalement des touristes venus de Corée ou de Chine. On retrouve bien quelques produits de marque coréenne dans les boutiques et la plupart des voitures ont leur volant à droite, comme au Japon mais ce sont les seules traces de l’Asie « asiatique » que nous connaissons depuis plus de deux mois, bien que Vladivostok ne soit qu’à une heure quarante de vol de Séoul et à plus de 6 000 kilomètres de Moscou à vol d’oiseau.

Nous arrivons la veille du Eastern Economic Forum (le Forum économique de l’Est), sorte de Davos local et nous sommes surpris par le nombre de jets privés alignés à l’aéroport. Jadis stratégique pour son port militaire sur le Pacifique, la Russie cherche aujourd’hui à peser également sur le terrain économique et commercial. En témoigne le gigantesque pont suspendu, devenu symbole de la ville qui traverse « la Corne d’or », bras de mer qui sépare la ville historique des nouveaux quartiers et nommé ainsi en référence à la Corne d’or d’Istanbul. Si la métropole turque se targue d’être le trait d’union entre l’Europe et l’Asie, Vladivostok voudrait bien être la porte de l’Europe sur le Pacifique.

Il y a donc eu beaucoup d’investissements dans la ville et au milieu des bâtiments du XIXème siècle et des grands ensembles uniformes typiques de l’époque soviétique ont poussé des tours modernes ça et là. Un grand bateau de croisière trône au milieu du port. Un peu plus loin, un vieux sous-marin est exposé juste à côté du grand bâtiment de la marine militaire. A l’intérieur, de vielles photos de marins et d’équipages, des médailles, des décorations et des uniformes, puis le poste de conduite, intact et les torpilles tout à l’avant.

Sur la grande place entre la gare et le port, un immense monument à la gloire des combattants de la Guerre contre le Japon rappelle l’importance militaire de la ville. Une église est en construction sur la même place et nous assistons à la pose d’une partie du bulbe doré caractéristique des églises russes. Un peu plus haut, la statue de Lénine, bras tendu vers le Pacifique semble veiller sur la gare et le port en contrebas. Un passant nous apostrophe l’air pincé en nous voyant la prendre en photo.

La gare de Vladivostok a été rénovée et est d’une propreté impeccable. Comme dans toutes les grandes gares russes, les bagages sont scannés et on passe sous un portique détecteur de métaux avant d’entrer. Un bel escalier d’époque descend sur le quai où commencent à embarquer les passagers. Notre train est déjà à quai et il est temps d’embarquer pour notre long voyage qui nous mènera jusqu’à Paris en dix-huit jours.

Vladivostok – Komsomolsk sur l’Amour

Nous découvrons le Transsibérien, ses cabines et son samovar. Première nuit en train et premier anniversaire : notre dernière a 6 ans! Nous prendrons le trajet du Transsibérien jusqu’à Khabarovsk, puis bifurquerons vers le Nord, vers Komsomolsk-na-Amur, sur le trajet de la BAM (Baïkal-Amour-Magistral), qui relie les villes du Nord du lac Baïkal à Moscou. Sur ce trajet, la ligne n’est pas électrifiée dans la première partie, et les rails ne sont pas soudés, ce qui donne le son caractéristique des voyages en train de  notre enfance…

Nous découvrons aussi le rôle de la Provodnitsa, en quelque sorte la concierge du train. En plus du contrôle des billets à quai qu’elle effectue scrupuleusement en vérifiant si les données indiquées sur son listing correspondent bien à celles du passeport (nom, prénom, sexe, date de naissance, nationalité, numéro du passeport), elle distribue les draps et serviettes, les tasses pour le thé, s’assure de la propreté de sa voiture et la nettoie régulièrement, s’occupe de la vente de nourriture, de boissons et de souvenirs, rappelle l’heure aux voyageurs descendus fumer une cigarette aux arrêts et ferme la porte à chaque départ. Dans chaque train voyagent également un technicien et trois policiers, deux jeunes en uniforme et un dernier un peu plus âgé, souvent à la carrure moins sportive, en civil. Ils occupent un compartiment à côté du nôtre et sont relevés aux grandes gares. Le technicien et les Prodnovitsas restent, eux, pendant tout le voyage.

Peu après le départ, les policiers reviennent avec deux hommes, dont l’un est un peu éméché et énervé. Ils les asseyent dans leur compartiment. Pendant l’heure qui suit, l’un des deux hommes semble protester contre le sort qui lui est réservé en vociférant, parfois en rigolant à voix haute. L’ambiance se calme un peu, puis ça repart de nouveau, si bien qu’au bout d’un certain temps le ton monte un peu plus et l’homme se retrouve plaqué au sol, à plat ventre avec les mains menottées dans le dos… au beau milieu du couloir. A la gare d’Ussuriysk, on le voit partir sur le quai avec son sac, les mains libres, suivant de loin deux autres policiers qui ne semblent pas trop se soucier de lui. Les policiers font régulièrement des rondes dans le train et on sent que la sécurité est prise au sérieux sur le Transsibérien. Lorsque la voie passe sur un long viaduc, on aperçoit à proximité un poste d’observation avec un soldat lourdement armé et des chiens.

La voie longe la côte occidentale de la péninsule. Il s’agit d’une voie double, électrifiée mais le train ne roule pas très vite. De la fenêtre on aperçoit le bord de mer avec par endroits des gens qui se baignent. Le soleil décline lentement et la lumière est douce. Les gens profitent de l’été qui touche à sa fin mais qui offre encore de belles journées aux températures très agréables. Deux Coréennes occupent la cabine à côté de la nôtre, elles se rendent à Khabarovsk pour regagner Séoul en avion. Une femme avec son garçon qui sait à peine marcher monte un peu plus loin, elle passera la nuit dans le compartiment également, s’efforçant de calmer son petit chaque fois qu’il se réveille. Un couple et leur bébé monte le lendemain.

La journée passe très vite à jouer et dessiner, et à regarder le paysage qui change, les personnes qui montent et qui descendent. Arrivés à Komsomolsk, la Provodnitsa ne nous laisse pas partir comme ça : où est-ce que nous allons dormir ? comme allons-nous y aller ? Pourquoi ne prenons-nous pas le train pour Tynda qui part un peu plus tard ? les questions fusent ! Et comme on ne se comprend pas très bien, elle nous rattrape à la consigne avec une dame anglophone pour s’assurer que nous ne sommes pas perdus dans la nature… Nous lui assurons que nous prendrons le tramway 5 pour rejoindre notre hôtel et que nous ne prendrons le train pour Tynda que le lendemain. Rassurées, elles nous laissent partir, nous voyant sûrs de nous.

Peu de temps après notre arrivée à l’arrêt de tramway, nous apprenons qu’il ne passera pas et nous verrons par la suite que la ligne a été supprimée depuis bien longtemps (pas sur Google Maps en revanche !). Qu’importe, nous irons à pied, il ne s’agit que de 4 kilomètres environ et nos gros sacs sont restés à la consigne de la gare, ça nous dégourdira les jambes après ces dernières 24 heures en train.

Sauf que nous nous perdons, que la nuit tombe, qu’au bout de trois kilomètres, nous nous apercevons que notre dernière a oublié son sac à dos avec tous ses jouets (dont ses cadeaux d’anniversaire) à l’arrêt du tramway, et que nous n’avons plus de batterie dans le téléphone qui a la carte de la ville…

Petit moment de désespoir, on monte dans un tramway un peu au hasard, et on finit par se retrouver. Après la traversée d’un pont truffé de trous en l’absence de plaque d’égouts, nous arrivons enfin dans notre hôtel. Il fait nuit noire ! Nous aurons mis 2 heures et demie pour faire les 4 kilomètres, mais les enfants sont ravis par la chambre qui a des variateurs de lumière, et le repas du soir est délicieux !

Komsomolsk sur l’Amour

Le lendemain, après une bonne nuit bien reposante pour nous, moins pour les enfants qui ont dormi à trois dans le grand lit, nous partons à la découverte de Komsomolsk. Les avenues sont larges, les bâtiments pastel et un peu délabrés. Pourtant les bords du fleuve Amour, par un beau soleil, doivent avoir beaucoup de charme.

Nous traînons un peu à l’hôtel, le petit déjeuner ne devant être servi qu’à 11h, et les enfants sont ravis de jouer avec des chatons : Komsomolsk est élue étape favorite! Après un super petit déjeuner, nous partons à la découverte de cette ville qui semble immense, avec de larges avenues, des bâtiments variés, certains dans un style rappelant l’Europe de l’Est, avec des façades travaillées et d’autres de l’époque soviétique, hauts et sobres. Les tramways sont brinquebalants et semblent avoir fait leur temps. Nous prenons un bus pour le centre et commençons par visiter le Musée de l’histoire de la ville. Des dames nous accueillent et nous guident dans les salles les unes après les autres, dans un ordre bien précis. Dans chaque salle, nous sommes surveillés comme le lait sur le feu.

On découvre dans une première salle les cadeaux qu’a reçu la ville, et notamment la combinaison d’un cosmonaute. Dans une autre salle viennent la faune et la flore de la région avec des dioramas fait d’animaux empaillés. La dame de la salle est très fière de nous montrer son coin interactif : une balance permettant de se peser en unités de lièvre polaire, d’ours, de grenouille ou de hibou. Dans cette salle, des maisons des premiers pionniers et des tribus locales ont été reconstituées, avec une grande peinture montrant l’arrivée des premiers Russes, un peu à la manière des aventuriers de l’Ouest américain. Ensuite, une autre salle met en valeur tous les accomplissements industriels et économiques de la ville avec un résumé de l’histoire russe de 1945 à 1990 en 2 minutes 30. Une dernière salle met l’accent sur l’artisanat local, et notamment les broderies des tribus locales. C’est assez sympa, mais quand nous sortons, il pleut et il fait très froid. Nous marchons quand même jusqu’au fleuve Amour, en traversant un immense parc dont l’aire de jeux fait le bonheur des enfants.

Le fleuve Amour a une largeur telle qu’on croirait un lac, on jette également un coup d’œil à une statue faisant honneur aux travailleurs, mais le froid et la pluie ont raison de nous et nous filons en tramway voir une jolie petite église avant de rejoindre la gare pour prendre notre train. Le temps de se ravitailler en nouilles chinoises, et nous sommes prêts pour notre second tronçon : Komsomolsk – Tynda.

Komsomolsk sur l’Amour – Tynda

Cette fois, nous resterons deux nuits dans notre petite cabine. Nous ne sommes pas nombreux dans notre voiture. Les paysages sont magnifiques et le temps passe vite, à regarder par la fenêtre, à jouer à des jeux de société, à lire ou dessiner. On prend nos petites habitudes, avec la nappe pour les repas, les lits avec les couettes biens chaudes et les futons confortables pour dormir.

Les paysages changent, l’automne s’annonce franchement, avec des couleurs plus marquées. Les arbres sont d’un superbe jaune avec encore quelques touches de vert clair et déjà de l’orange et du rouge. Beaucoup de troncs sont sombres et petits, comme si quelques années auparavant tout avait brûlé. On apprendra plus tard que c’est effectivement le cas : des centaines de milliers d’hectares ont brûlé en 2013. Le train s’arrête dans des petites gares improbables et essentiellement des hommes seuls en descendent ou y montent. Ce sont des bûcherons venus pour y travailler. Du train, on assiste à des scènes de séparation ou de retrouvailles entre les familles, ou entre un bûcheron et une employée des chemins de fer.

Pour les repas, c’est toujours les pâtes et les purées instantanées, avec du pain et du fromage, et quelques fruits ou concombres quand on en trouve. Et du thé et des tisanes toute la journée!

On arrive à Tynda tôt le matin et sous la pluie.

Tynda

Construite dans les années 70, Tynda est au milieu de la BAM, à l’intersection des lignes Est-Ouest et Nord-Sud. La ligne Est-Ouest est celle que nous empruntons, de Komsomolsk sur l’Amour à Lena, la ligne Nord-Sud relie la Yakoutie au Nord à la ligne du Transsibérien qui passe près de la frontière chinoise au sud. Tynda est un nœud ferroviaire important et le chemin de fer est la seule activité de la petite ville qui compte tout de même près de 30 000 habitants.

C’est par un matin froid et pluvieux que nous débarquons du train. Il est presque 7 heures du matin, de grosses flaques inondent une partie des quais et le thermomètre de la gare affiche 5°… L’été est bel et bien fini. A l’intérieur de l’immense bâtiment, quelques ampoules essayent d’apporter un peu de lumière dans le large et haut hall où des passagers attendent leur train dans la pénombre. Quelques seaux et serpillières sont disposés ça et là pour recueillir l’eau qui goutte du toit. L’ambiance est un peu glauque. Au milieu de la gare, une petite fontaine semble faire jaillir moins d’eau que les fuites du toit. Nous avalons notre petit déjeuner dans la pénombre, au milieu des autres voyageurs qui sont en grande majorité des hommes seuls, et seuls nos chuchotements rompent le silence.

Une dizaine de chambres ont été prévues dans la gare pour les voyageurs en correspondance mais la seule disponible n’a que deux lits et un lit pour enfant. Nous devons donc aller chercher un endroit pour dormir en ville. De l’autre côté de la rivière Tynda que nous traversons à pied entre de grosses canalisations, la ville est à l’image de sa gare : des infrastructures qui étaient sans doute à la pointe de ce qui se faisait dans l’Union soviétique des années 70 avec de grandes avenues, des parcs bien aménagés, des bâtiments publics surdimensionnés, des monuments imposants à la gloire des soldats de la Deuxième guerre mondiale, la statue de Lénine… Depuis, plus rien et tout semble s’être lentement dégradé sans que rien de nouveau ne vienne se construire. Seules les voitures japonaises nous rappellent que nous sommes bien au XXIème siècle.

L’hôtel Yunost que nous avions identifié et qui est recommandé par les voyageurs de passage est complet aussi. La même scène qu’à la gare se répète : les dames se regardent entre elles. Celle qui est de service nous regarde d’un air à moitié désolé, à moitié exaspéré, se retourne vers les autres, collectivement elles essaient de comprendre, répondre, écrivent sur un bout de papier ou sur une calculatrice pour les chiffres. Ce n’est ni de l’indifférence, ni de la mauvaise volonté car elles finissent toujours par nous aider d’une manière ou d’une autre mais le fait de devoir expliquer des choses à des gens qui ne comprennent pas un mot de russe les ennuient visiblement beaucoup.

Toujours sur notre téléphone, nous repérons un restaurant : Ararat. Le nom est évocateur et nous nous disons qu’avec un peu de chance, il est tenu par des Arméniens avec qui nous pourrons communiquer, au moins pour le menu. Le lieu est désert, un peu à l’écart de la ville. Une grande salle sombre avec plein de tables et de chaises, vide. Au bout, le bar. Une dame arrive et semble nous expliquer qu’elle ne souhaite pas recevoir de clients ne parlant pas le russe. Et l’arménien ? Son visage devient plus souriant et nous pouvons nous asseoir, choisir enfin en connaissance de cause et manger deux pizzas, un plat de frites et une grillade de saumon après une longue attente qui n’a fait que rendre les plats meilleurs.

Après avoir acheté quelques vêtements chauds, tout va mieux ! Les enfants profitent un peu des aires de jeux de l’immeuble voisin avant d’aller explorer le musée de la BAM.

Le musée de la BAM raconte le passé de Tynda, intimement lié au chemin de fer. Des premiers indigènes (les Evenki) qui vivent toujours dans la région à l’arrivée du chemin de fer qui a transformé Tynda, une dizaine de salles remplies d’objets en tout genre, de photos et toujours les fameux diplômes et certificats. Nous devons être les seuls visiteurs du jour. A l’entrée, deux femmes discutent, elles semblent contentes de nous voir. L’une d’elles parle très bien l’anglais, et pour cause, c’est une professeur d’anglais à la retraite, installée à Tynda depuis 1979. Elle commente sans cesse le fait que notre dernière ne soit pas assez couverte, ça lui fend le cœur de voir qu’elle va tomber malade. Et notre fils qui a l’air si enrhumé, décidément, nous sommes un peu inconscients de venir ici pas suffisamment équipé… Parfois, on regrette la barrière de la langue

Elle nous ouvre les salles, les unes après les autres et nous explique avec une fierté à peine dissimulée les défis qui ont dû être relevés pour la construction de la ligne, les cours d’eau, les montagnes, l’éloignement, le froid. Dans une salle, on voit une photo de l’inauguration de la ligne avec deux locomotives face à face dans la gare de Tynda entourées d’une nuée d’officiels en chapka. C’était le 27 septembre 1984. Ce jour semble l’avoir personnellement marquée. C’est ce jour qu’a eu lieu la jonction entre les parties orientales et occidentales de la ligne. Une salle évoque aussi le travail des prisonniers politiques qui ont participé à la construction de certaines parties de la ligne, dans des conditions atroces. En revanche, la participation des prisonniers japonais pendant la Deuxième guerre mondiale est passée sous silence. La partie orientale que nous venons de prendre d’un bout à l’autre a été construite par l’Armée rouge tandis que la partie occidentale, la plus complexe, a été construite par les Komsomolets, les membres de l’association de jeunesse communiste (Komsomol). A cause du relief, elle est composée de beaucoup de ponts et de tunnels dont le plus long mesure 15 kilomètres. C’est cette partie que nous parcourrons le lendemain.

Le lendemain, justement, quand nous arrivons sur le quai, le train est là depuis longtemps. Il vient de Yakoutie et nous attendons sur le quai que les Provodnitsa veuillent bien ouvrir les portes. Les voitures sont anciennes et contrairement aux trains précédents, le chauffage est assuré par un poêle à charbon qui crache une fumée âcre depuis les cheminées présentes dans chaque voiture. Des familles font leurs adieux à leurs proches montés dans le train, quelques larmes coulent sur les joues de notre voisine de compartiment. Elle vient de quitter sa fille et sa petite fille. Le voyage jusqu’à Moscou est long et dure près de cinq jours mais nous nous arrêterons avant, sur les bords du Lac Baïkal, avant de poursuivre notre chemin.

Tynda – Severobaïkalsk

Sur cette section de la BAM, nous passons beaucoup de rivières et commençons à voir les montagnes. On reprend nos petites habitudes, nos lectures et nos jeux. Les paysages changent et les larges virages que prend le train pour monter ou descendre nous permettent de les découvrir sous toutes les coutures!

Le premier jour, les paysages ne sont pas très différents, mélange de bouleaux et de conifères aux épines jaunes. L’eau des ruisseaux et des rivières est très sombre et à certains endroits, on voit de la mousse se former, ce qui est assez surprenant vu qu’il ne semble pas y avoir d’activité humaine dans les environs. Les traces des incendies de forêt, sans doute ceux de 2016 qui ont ravagé plusieurs centaines de milliers d’hectares dans toute la Sibérie, sont en revanche bien visibles partout et on voit de vastes étendues sur lesquelles ne subsistent que quelques restes d’arbres morts ou calcinés. De petits arbres ont commencé à repousser et leur frêle silhouette jaune se démarque de la couleur encore sombre du sol.

Notre train dispose d’une voiture restaurant et nous décidons de briser le rituel des nouilles instantanées et des purées que nous préparons habituellement avec l’eau bouillante du samovar qui se trouve au bout de chaque voiture, régulièrement alimenté et astiqué par la Provodnitsa de service. Nous sommes les seuls à commander à manger. La voiture restaurant est plutôt vide : une table est occupée par le personnel et deux autres par des hommes déjà bien joyeux mais qui continuent à remplir leurs verres, de bière ou de Vodka. A plusieurs reprises, le personnel leur demande poliment de parler moins fort et de se tenir à l’écart de notre table. Bientôt le train s’arrête pour un de ces longs arrêts qui fait descendre la moitié des voyageurs pour fumer, discuter ou simplement se dégourdir les jambes. Manger de la viande et du poisson grillés avec des frites est un vrai bonheur pour les enfants qui commencent à se lasser des nouilles chinoises et des purées instantanées.

Le lendemain, nous nous réveillons au milieu des montagnes. Beaucoup plus hautes que toutes celles qu’on avait pu voir, elles ont les cîmes déjà bien blanches. Les collines les plus proches ont de drôles de formes géométriques qui les rendent étranges, presque artificielles.

Le soleil se lève et c’est une symphonie de couleurs qui défilent à notre fenêtre, le bleu du ciel par endroit vient s’ajouter aux différentes nuances de jaune et au vert sombre des conifères à aiguilles persistantes. Les bouleaux se font plus discrets mais leurs jolis troncs blancs apparaissent par groupes. L’eau est plus claire et les paysages se reflètent dans le calme des grandes marres ou des étangs.

La région est aussi moins sauvage et on voit davantage de traces humaines : des lignes électriques, des routes goudronnées, des voies de chemin de fer qui rejoignent la nôtre. Par endroit la voie est doublée et une locomotive électrique a remplacé celle au diesel qui nous tirait depuis Tynda (et même depuis que nous avons quitté la ligne du Transsibérien à Khabarovsk). Et toujours les arrêts dans les petites villes, ou les gares esseulées. Parfois, on aperçoit une vache qui se promène dans les rues désertes.

Les voyageurs changent aussi et un couple s’installe dans le compartiment près du nôtre, ils ont plein de caisses et de cartons qu’ils essaient de caser où ils peuvent dans le compartiment. Notre Provodnitsa passe l’aspirateur dans le couloir et tous les compartiments après avoir astiqué toutes les portes et les rebords des fenêtres. Elle vient nous demander l’âge de notre petite dernière et lui offre un cahier d’autocollants des chemins de fer russes.

Les lacs et marécages se font de plus en plus nombreux et on devine au loin le début du lac Baïkal. Bientôt nous surplombons ses rives et les quelques villages au bord, faits de petites maisons en tôle. En face, les hautes montagnes sont à moitié recouvertes de neige. Le train arrive à Severobaïkalsk où nous nous arrêtons.

Severobaïkalsk

Tout comme Tynda, la raison d’être de Severobaïkalsk est la ligne de chemin de fer BAM et la petite ville a été construite dans les années 70 à partir de rien. L’urbanisme est caractéristique des villes nouvelles de l’époque avec de très larges avenues bordées de verdure formant un plan géométrique, une place centrale avec le bâtiment de l’administration locale, le palais du peuple, une galerie commerciale et un grand parc arboré juste derrière.

Contrairement à Tynda, on a l’impression que la ville a été entretenue. Les aires de jeux pour enfants sont quasi neuves et la ville est assez propre. Autour du centre, des constructions plus récentes ont fleuri, toutes habillées de tôle colorée pour les toitures comme pour les murs.

La gare est un bâtiment assez inhabituel, fait de brique et de béton peint avec un immense toit en forme de vague. Une grande passerelle aux marches irrégulières traverse les voies vers le Lac Baïkal. Il se met à pleuvoir. Nous tournons le dos à la ville et nous prenons la passerelle pour nous diriger vers l’hôtel qui se trouve un peu à l’écart de la ville, près de la route qui longe le lac. Les trains de fret sont garés les uns à côté des autres : toujours du bois, mais aussi des wagons citernes et du minerai apparemment.

Sur l’autre rive, le lac et les montagnes enneigées. Nous prenons un petit chemin de terre qui longe la route jusqu’à l’hôtel. Tout semble désert et nous nous demandons si l’hôtel est encore ouvert à cette saison. Heureusement, une jeune femme nous a vu arriver et nous ouvre la porte. Nous sommes les seuls clients. Une fois de plus. A l’étage, notre chambre donne sur le lac et on aperçoit sur le côté la voie de chemin de fer que nous venons de prendre avec ses tunnels. En contrebas, une caserne qui semble être celle de l’unité de marine en charge du Lac Baïkal. Des militaires marchent au pas à l’intérieur des palissades garnies de fils barbelés. A l’entrée, deux soldats sont occupés à repeindre en noir une chicane.

Un peu plus loin, une jetée avec quelques pêcheurs. La plage est déserte et l’eau du lac est déjà bien froide. Il n’y aura pas de baignade, surtout que la température extérieure n’excède pas les dix degrés. Nous dînons dans un café qui surplombe la plage. Au-dessus de nous, il y a une fête et de nombreux invités passent, déguisés, certains avec de fausses armes, l’un avec une vraie Kalachnikov… on ne connaîtra pas le thème de la soirée ! Tout comme à Tynda ou Komsomolsk, nous finissons par comprendre que tous ces vastes hôtels, cafés et restaurants à l’écart des villes dans lesquels nous avons toujours l’impression d’être les seuls clients sont en fait destinés en premier lieu aux anniversaires, aux mariages ou autres fêtes qui doivent faire partie des rares divertissements des habitants. La soirée se terminera par un feu d’artifice qui nous tirera de notre sommeil aux alentours de minuit.

Le lendemain, le lever de soleil sur le Lac Baïkal est splendide. Puis, après un copieux petit déjeuner local  : 3 œufs au plat par personne, avec des saucisses, tomates et concombres, et accompagnés d’un peu de pain et de petits croissants fourrés, nous longeons les rives du Lac Baïkal sur un petit sentier surplombant la plage. Les nuages ont fait un peu de place au soleil qui révèle les plus belles couleurs des arbres sur le fond gris bleu de la vaste étendue d’eau.

La grande plage de Severobaïkalsk est fréquentée par quelques pêcheurs et de rares promeneurs. Un belvédère permet d’admirer la vue vers le sud du lac avec une péninsule sur laquelle ont été construites des petites maisons.

Nous reprenons la passerelle vers la ville cette fois-ci. Une fois déposés nos bagages à la consigne de la gare, nous nous dirigeons vers le centre de la ville. Le centre commercial ressemble à ceux qu’on trouve dans d’autres villes : une grande halle dans laquelle se trouvent des petits magasins. Du côté de l’alimentation, ce sont des stands de vendeurs indépendants qui proposent chacun leurs produits (parfois les mêmes que ceux des voisins) et on a parfois du mal à savoir s’il s’agit d’une épicerie, d’une boulangerie, d’une crémerie ou d’une charcuterie tellement les produits sont mélangés. Après un petit pique-nique à l’aire de jeux au milieu des jeunes qui rentrent de leurs cours, nous visitons rapidement la petite église pimpante et entourée de parterre de fleurs bien entretenus.

Plus loin, un tout petit musée expose outre la faune et la flore du Lac Baïkal, quelques objets et documents de la BAM et une salle sur la Bouratie (la région dans laquelle nous nous trouvons) et ses habitants historiques qui ressemblent beaucoup aux nomades de Mongolie. La fierté locale semble être une otarie artiste peintre.

Le départ de notre train approche et nous devons rejoindre la gare en faisant à nouveau un petit tour par les magasins pour nous approvisionner en nouilles instantanées et purée en poudre, le menu typique du voyage en Transsibérien.

Severobaïkalsk – Ekaterinbourg

Ce sera notre plus long voyage en train. Et notre second anniversaire roulant : après les six ans de la plus jeune, le plus vieux fête ses 44 ans! Trois jours et deux nuits pour parcourir plus de 3 700 kilomètres. Notre train part de Severobaïkalsk et va jusqu’à Moscou. Nous nous arrêterons avant, à Ekaterinbourg au pied de l’Oural, pour une dernière courte halte en Asie. Le train est donc vide et nos Provodnitsas regardent comme d’habitude scrupuleusement nos billets et nos passeports en vérifiant les noms, prénoms, numéros de passeport.

Le train démarre et la voie quitte les rives du Lac Baïkal tout de suite après la sortie de la ville pour s’enfoncer dans une vallée. S’ensuivent de grandes boucles et des tunnels pour descendre petit à petit. Les montagnes sont plus rocailleuses mais les arbres sont toujours là, avec leurs belles couleurs d’automne. En plus du vert sombre et du jaune vif, on commence maintenant à voir des feuillages orange flamboyant, sans doute des bouleaux. La nuit tombe sur ce paysage magnifique malgré le temps pluvieux.

Le lendemain, les bougies de l’anniversaire nous vaudront une réprimande de notre Provodnista, déjà pas très commode au quotidien. Mais seul le rhume (collectif, merci les petites cabines) nous freine un peu dans notre enthousiasme. Au moins, quand on est dans le train pendant aussi longtemps, on peut dormir pour faire passer la maladie plus vite!

Nous avons quitté la ligne BAM et beaucoup de choses ont changé. Les voies doubles électrifiées sont maintenant la norme et le bruit régulier du double claquement des roues sur les joints des rails a disparu également. Place aux voies rénovées donc et aux rails soudés qui permettent aussi au train d’aller plus vite. Dehors, le paysage a changé aussi. La ligne étant beaucoup plus ancienne, les gares ne sont plus du style des années 70 mais en bois pour les plus petites, ou peintes dans des tons bleu clair ou rose pastel très « Mitteleuropa ». On s’arrête prendre en photo la locomotive historique indissociable de chaque gare.

On aperçoit également beaucoup de petites maisons en bois, plus ou moins décorées, parfois seulement le cadre des fenêtres et les portes, d’autres fois, elles sont entièrement peintes. Les toits sont souvent en tôle, rouillée ou colorée. Ce sont des petites maisons simples, avec une cheminée qui fume, du linge coloré étendu dehors, des ornières profondes dans la boue et de grandes flaques et on imagine que les gens qui habitent ces maisons ont une vie très modeste.

Le paysage a beaucoup changé et les traces de la civilisation se multiplient au fur et à mesure que nous avançons vers l’ouest. Des lignes haute tension, des usines en fonctionnement ou désaffectées, des routes goudronnées avec bretelles d’accès. On est bien loin des paysages sauvages des premiers jours. A l’intérieur du train, la vie suit son cours.

Les Provodnitsas effectuent consciencieusement leurs tâches : passer l’aspirateur tous les jours dans les couloirs et les compartiments, nettoyer les toilettes, le samovar, faire la poussière sur le rebord des fenêtres. Aux arrêts, elles interrompent ces tâches pour mettre leur tenue officielle avec le pardessus et la casquette avec l’insigne des cheminots pour descendre sur le quai, devant leur porte. Il y a deux sortes d’arrêts : les arrêts courts et les arrêts longs. Les arrêts courts durent en général une minute et ont lieu dans les petites gares. Ils sont juste destinés à faire monter et descendre les voyageurs. Les arrêts longs durent entre vingt minutes et une heure. Ils laissent le temps d’aller faire un tour sur le quai, dans la gare voire à la pharmacie à l’extérieur pour acheter des médicaments. Pendant ce temps, les réservoirs sont remplis, les poubelles sont vidées et les bogies des voitures sont inspectés: des employés passent avec un long marteau et donnent un petit coup sur les roues, les ressorts, les capots. Chaque pièce a son son, tintant et résonnant pour les ressorts et les roues, sourd et creux pour les capots. La nuit, une lampe les aide à mieux voir sous les voitures qui sont tellement haute qu’on peut passer dessous sans problème.

Les gares sont de plus en plus grandes et on ne fume plus sur les quais. On fait les cent pas, en tongs et survêtement, ou en short, on achète deux trois choses à lire ou à manger à un petit kiosque du quai et c’est déjà l’heure de repartir. Le personnel de bord est le même pendant tout le voyage et a également ses cabines. Les provodnitsas sont en binôme dans chaque voiture et elles se relaient toutes les douze heures.

Le chef de train a également sa cabine avec un gros poste radio, un ordinateur portable et une imprimante posés sur son bureau juste à côté de sa couchette. Vêtu de son uniforme étoilé, il passe une fois pendant le voyage dans tous les compartiments pour demander au passagers si tout se passe bien et s’ils sont satisfaits de leur séjour à bord. Outre le technicien, il y a aussi le personnel du restaurant qui fait tout le voyage. Un vrai équipage en fin de compte qui, comme dans un bateau, vit sa vie tout en travaillant, compose avec ses collègues, partage ses repas avec eux et profite des arrêts longs en gare pour téléphoner à ses proches.

Les portes des cabines du personnel sont souvent ouvertes et on sent de temps en temps les bonnes odeurs de cuisine préparée tant bien que mal avec les casseroles du restaurant et l’eau brûlante du samovar. Comme partout ailleurs, les conducteurs restent invisibles et doivent tourner au gré des changements de locomotive qui ont parfois lieu lors des arrêts longs.

A Tayshet, notre ligne rejoint celle du Transsibérien, celle qui longe la frontière chinoise, contourne le Lac Baïkal par le sud et passe par Irkoutsk. Les usines sont de plus en plus grandes et les villes aussi. Krasnoïarsk, Novossibirsk, Omsk, les gares sont majestueuses et imposantes. De couleur claire, entre le vert et bleu, elles sont garnies d’ornementations d’un blanc si éclatant qu’on dirait de la crème sur une pâtisserie géante.

Nous ne verrons que les gares mais du train on aperçoit quand même les changements au fur et à mesure qu’on avance, quelques tours modernes apparaissent, les voitures sont plus récentes, des tramways ou des trolleybus se bousculent dans les avenues. En s’éloignant, au-delà des gares de triage et des dépôts, ce sont les paysages si caractéristiques des ex-pays du Bloc de l’Est où se mélangent les friches industrielles, les petites maisons de bois et les lopins de terre cultivés. Des personnes isolées marchent le long des voies pour rentrer du travail ou aller au bord d’un étang, une vache broute paisiblement entre deux voies, derrière elle, un complexe industriel désaffecté semble abandonné depuis plusieurs décennies.

Entre les villes, les paysages ne varient plus trop et on passe des plaines aux collines boisées, des forêts aux marécages et toujours les mêmes petites maisons de bois et les éternels bouleaux aux troncs clairs et aux feuillages multicolores qui tirent toujours un peu plus vers le rouge. Malgré tout, on pourrait rester des heures, le nez collé à la vitre, voir défiler ces paysages pour ne rater aucune minute de ce spectacle dont on sent la fin proche. Après trois nuits, nous arrivons enfin à Ekaterinbourg à l’aube.

Il est cinq heures et la grande gare semble se réveiller doucement mais nos montres qui sont restées à l’heure de Severobaïkalsk indiquent huit heures et malgré le rhume que nous traînons tous depuis quelques jours, nous sommes en forme pour une visite éclair de la ville avant de reprendre le train pour Moscou à quatorze heures.

Ekaterinbourg

Brusquement, nous sommes de retour en terrain connu : les annonces sont faites en anglais dans la gare, les panneaux sont traduits en alphabet latin, la mode est européenne. Nous débarquons à cinq heures du matin dans notre hôtel, et à la charmante réceptionniste un peu surprise, nous expliquons que si si, nous voulons bien notre chambre : une bonne douche s’impose après ce long trajet en train ! Une fois pris notre petit déjeuner, nous partons découvrir Ekaterinbourg, la ville où s’est achevée la dynastie des Tsars.

Nous commençons par l’Eglise de tous les Saints, qui commémore justement l’assassinat de 1918. Dans le sous-sol de l’église, une sorte de petit sanctuaire, à l’endroit même où le Tsars et sa famille ont été tués. La villa même où ils étaient retenus prisonniers a été détruite en 1977, mais en 2000, l’Eglise orthodoxe a décidé de construire un grand complexe commémoratif, avec un musée, deux églises et un beffroi. Pendant la messe, les gens vont et viennent, les femmes ont toutes la tête couverte, même les petites filles. Pas de bancs, ni de chaises, tout le monde reste debout. Les chants sont magnifiques. A l’extérieur, en sortant du bâtiment, les croyants se retournent une dernière fois au bas des marches pour un dernier signe de croix.

Ensuite, nous découvrons le métro, splendide, qui tient plus du château ou de l’église que du transport en commun ! Parce qu’Ekaterinbourg est une ville minière, chaque station a été construite avec une pierre différente. En revanche, il faut scanner ses sacs et bagages en y entrant. Puis on achète un jeton qui sert de ticket. La sécurité est ici prise très au sérieux : des bâtiments à l’extérieur de la gare ont même été construits dans ce but. Partout des gardes et des policiers surveillent les passants.

A la demande de fiston, nous allons ensuite à la galerie de minéralogie : Ekaterinbourg est pratiquement sur la chaîne de l’Oural et son économie repose en grande partie sur l’extraction de minerais. Un dernier tour en ville et on repart pour Moscou.

Ekaterinbourg – Moscou

Cette fois, nous avons une voiture toute neuve, moderne, à la pointe de ce qui se fait en termes de train de nuit. Notre enthousiasme est sans borne et notre seule tristesse est de n’y passer que 26 heures… Ah, si seulement nous avions eu cette cabine pour le tronçon précédent !

Deux prises électriques dans la cabine, 4 prises USB, des petits placards dissimulés dans les appuis-tête, une grande table rabattable, des vrais sièges, … la liste est longue des améliorations apportées à cette génération de trains-couchettes. Dans la voiture, le samovar est également de nouvelle génération et les toilettes dignes de celles d’un avion! Un panneau affiche en temps réel les températures extérieure et intérieure, ainsi que l’heure locale (nous traversons deux fuseaux horaires, on rattrape peu à peu notre décalage d’avec Paris). La nuit est calme (enfin, pour nous, parce qu’à côté, bébé Natasha met l’ambiance…), le train est stable et bien insonorisé.

Dehors, c’est le retour des feuillages d’automne dont on ne se lasse pas.

Et des arrêts dans les gares avec la sempiternelle locomotive historique, la cigarette et l’achat du repas suivant. Nous traversons des villes de plus en plus grande, avec des gares imposantes et des barres d’immeubles colorés.

Mais aussi des petits villages, avec toujours le promeneur incongru, perdu au milieu de nulle part, qui longe les voies ou s’éloigne vers la campagne vers un but indéterminé.

L’Asie, c’est bien fini, nous sommes désormais officiellement dans l’Europe géographique.

Moscou

Nous arrivons à Moscou en milieu d’après-midi et la température affichée est de 29°! Nous sommes tout content après le froid de la Sibérie. Les enfants sont ravis de notre logement moscovite, plein de petites pièces et décoré avec une exubérance de couleurs et de meubles disproportionnés. Nous sommes dans l’ambiance !

Après une bonne nuit, nous voilà partis à la découverte du Kremlin. Et là, c’est le choc : des hordes de touristes en groupe, venus de partout, mais surtout de Chine. Ça nous change beaucoup ! Le Kremlin est la forteresse historique de Moscou, siège du pouvoir russe depuis le XVème siècle environ. A l’intérieur des remparts, des églises, le siège du pouvoir actuel et le Palais des armures, qui contient les trésors nationaux hérités des Tsars. A l’extérieur, la place rouge, avec la Cathédrale de Basile le Bienheureux, flanque l’enceinte du Kremlin. En face de l’enceinte de briques rouges, de l’autre côté de la place, un immense bâtiment, digne d’un palais ou d’un siège de gouvernement, est en fait GUM, un grand magasin moscovite, à l’image du Bon Marché ou de la Samaritaine d’antan, construit il y a plus d’un siècle.

Derrière la Cathédrale de Basile le Bienheureux, le regard porte loin et la variété architecturale de Moscou saute aux yeux, avec pour point de mire les gratte-ciel de Staline, sorte d’immenses cathédrales de bureau dont le sommet fait penser à la pointe de l’Empire State Building de New York, à la seule différence près qu’une étoile est posée dessus. Au Kremlin comme ailleurs, les signes et monuments de l’Union soviétique sont toujours là, au milieu d’une place ou sur la façade d’un bâtiment, dans les couloirs du métro ou au coin d’une rue, le marteau et la faucille, le soldat et l’ouvrier, l’étoile rouge, peints, sculptés, gravés ou en mosaïque, ils ne dérangent visiblement ni les clochers dorés et leurs croix orthodoxes, ni les aigles à deux têtes, emblèmes de la Russie des Tsars et d’aujourd’hui.

Lors de la visite du Palais des Armures, nous admirons les trésors d’orfèvrerie des Tsars, des évangéliaires recouverts de pierres précieuses et de fils d’or torsadés en motifs délicats, des brûle-parfums en forme de château perché sur un rocher, des fontaines à vin ou à eau, des vases… tout est doré, argenté, recouvert de pierres précieuses. Nous apprenons comment les modes se sont succédé, les Allemands reprenant le marché aux Anglais avec des formes baroques, puis les Français prennent le dessus, d’abord avec un style classique, aux formes simples et aux lignes droites qui tranchent avec le baroque allemand. Et enfin c’est le style Empire qui domine, avec ses motifs influencés par l’antiquité

Dans une autre salle, des carrosses exposés montrent le détail des sculptures de bois recouvertes d’or et l’évolution des techniques d’amortissement. L’un des carrosses est en fait un traineau et était tiré par 23 chevaux, ce qui a permis à Catherine II de faire le voyage Saint-Pétersbourg – Moscou en trois jours seulement.

Dans une autre partie, un fond de diamants est présenté : la Russie est le premier producteur mondial de diamants. C’est impressionnant, des pépites d’or énormes, des diamants partout, des pierres précieuses, brutes ou taillées, montées en bijoux ou en petits tas en forme de carte de Russie ou de modèle de taille de diamant. Les enfants écoutent religieusement l’audioguide. Ils apprécient particulièrement le chapeau en rubis, or et diamants de la poupée dilapidatrice.

Le jour suivant, il pleut et il fait froid, ce qui nous freine beaucoup dans notre exploration de Moscou. Nous passons quand même dans la « City », admirer les nouveaux gratte-ciel qui font penser à la Défense, leur grand centre commercial au milieu, et plus loin, un de ceux de Staline. Puis nous montons dans un tramway pour découvrir Moscou au hasard.

Dans les métros, impressionnants par leur taille et la variété de leurs lustres et de leur décoration, des mosaïques ou des peintures louent le travail de la terre, le sport, les sciences, Lénine.

Il est déjà temps de quitter cette capitale aux facettes si diverses. Loin de l’image de ville froide, austère et peu accueillante que nous nous faisions, nous avons trouvé une richesse architecturale inattendue, où le néo-classicisme semble avoir été poussé à ses limites, le style soviétique n’a pas été avare en ornementations à outrance non plus à l’image des stations de métro. Quant à l’ère post-soviétique, on dirait que le mauvais goût « nouveau riche » a vite laissé la place à des immeubles au style audacieux comme cette tour « vrillée » au milieu de la City.

On y trouve tous les attributs des grandes capitales européennes de la jeunesse habillée à la dernière mode, aux quartiers de luxe où se bousculent les belles voitures, en passant par les couloirs de métros grouillant de personnes de tous âges et de tous horizons, les embouteillages dans les immenses avenues. Nous n’avons passé que trois jours à Moscou et la quittons avec l’impression de n’en avoir vu qu’une infime partie.

Pour notre trajet Moscou – Kiev, les places en seconde classe étant trop chères, nous sommes en dortoir (classe Platskart) et l’ambiance est bien différente. Des groupes de 4 couchettes sont séparés par des cloisons, perpendiculaires au sens de la marche, et de l’autre côté du passage, deux couchettes superposées sont disposées dans le sens de la marche. Celle du bas se transforme en petite table et sièges pour deux personnes. Tout le monde se couche tôt, nous suivons le mouvement.

Vers 22 heures, nous passons le point de contrôle russe de la frontière. Les douaniers fouillent un de nos sacs avec minutie, allant jusqu’à rouler les crayons de couleurs dans leur boîte et inspecter l’aquarelle. Notre voisin subit le même traitement. Être en dortoir permet de se sentir moins seul face aux uniformes. Un gros chien passe ensuite, reniflant bruyamment tous nos bagages. Puis une armada de fonctionnaires débarquent dans la voiture pour vérifier les passeports, il faut tourner les enfants endormis pour que les dames voient leur visage.

Deux heures après, c’est au tour des Ukrainiens. L’officier qui nous contrôle est sec, il nous demande où nous allons et inspecte minutieusement tous les passeports, mais ne nous demande pas de réveiller les enfants qui sont tournés du bon côté. Et il laisse tranquille nos bagages. Un petit chien rigolo passe, lui réclamant des caresses au passage, il n’est clairement pas en train de travailler.

Kiev

A 5h du matin, il fait très froid. Nous déposons nos bagages à notre hôtel et finissons au fast food de la gare, seul endroit ouvert pour le petit déjeuner. Il est bondé, mais le porridge et le camembert pané sont les bienvenus.

Kiev est une très jolie ville aux façades variées et aux tons pastel si typiques de l’Europe orientale. Des dômes dorés rompent ça et là la ligne de toit des immeubles. Il est très tôt et la ville s’éveille quand nous passons sur la place de l’Indépendance, déserte ou presque. Des photos rappellent ceux qui ont donné leur vie lors de la révolution de 2014.

Nous commençons par Sainte Sophie et sa Tour des cloches qui domine la place. Les murs sont blancs et mettent en valeur les bulbes dorés. Les bâtiments sont en fait construits en brique, puis peints. A l’intérieur, c’est une abondance de dorures, de mosaïques dorées, d’icônes. Le sol est sombre, recouvert de carreaux métalliques noirs. Des maquettes dans l’entrée nous montrent l’évolution architecturale du bâtiment pendant ses mille ans d’existence.

Du haut de la tour des Cloches, la vue sur la ville est splendide et donne un aperçu de son étendue et de sa variété architecturale.

A l’autre bout de l’avenue, l’Eglise Saint Michel, détruite dans les années 30 par le régime communiste puis reconstruite entièrement lors de l’indépendance de l’Ukraine. Contrairement à la Russie, tous les signes de l’ère communiste ont disparu à Kiev. Une petite étoile au sommet d’un obélisque, c’est à peu près tout ce que nous avons pu voir. La responsabilité et les errements du gouvernement soviétique au moment de la catastrophe de Tchernobyl, à un peu plus de cent kilomètres au nord de Kiev, n’ont en revanche pas été oubliés.

Rempli d’objets, de photos et de documents authentiques, le musée de Tchernobyl retrace l’histoire de la centrale et explique en détail la catastrophe nucléaire du 26 avril 1986. Si la construction et la conception de la centrale ont d’abord été mises en cause, c’est ensuite l’erreur humaine qui a été présentée comme cause de la catastrophe par les autorités, et le chef de la centrale a été condamné à dix ans de prison. Il sera finalement libéré en 1991.

Les décisions politiques d’étouffer l’affaire, puis de la minimiser, sont documentées, comme le maintien du défilé du 1er mai dans les villages alentours. Des mesures anormalement élevées relevées en Suède (qui a d’abord cru à un problème sur une de ses centrales tellement les niveaux étaient supérieurs à la moyenne) ont finalement contraint Moscou a révéler un « problème » sur une centrale : quelques lignes dans le journal Pravda relatent l’incident et la mise en œuvre de moyens pour le traiter dans la plus belle langue de bois de style soviétique de l’époque. Un espace permet une expression plus artistique. La catastrophe de Fukushima est aussi évoquée, ainsi que l’état des politiques nucléaires dans le monde. L’Autriche est le seul pays au monde où le nucléaire civil est interdit dans la loi, et seuls l’Allemagne, la Suisse et le Japon ont prévu de diminuer leur parc nucléaire. L’Ukraine prévoit d’en construire davantage. Le musée nous rappelle d’ailleurs que la centrale de Tchernobyl n’a été arrêtée définitivement que dans les années 2000, près de quinze ans après la catastrophe. Signe qu’ici comme ailleurs, les alternatives durables au nucléaire sont longues et difficiles à mettre en œuvre.

A la fin de l’exposition, un quizz permet de faire le point sur ce que nous avons retenu du musée… Après de nombreuses tentatives, nous finissons par répondre juste à toutes les questions et gagner une entrée gratuite pour revenir au Musée !

Le lendemain, avant de prendre notre train, nous faisons un tour rapide sur les hauteurs qui dominent le fleuve Dniepr jusqu’à la Laure des Catacombes, un ensemble religieux magnifique considéré comme le centre spirituel de l’Eglise ukrainienne. Lors de la messe, les vieilles dames apportent à manger, servent du thé. Les gens vont et viennent, le tout enveloppé dans des chants superbes. C’est convivial et simple. Nous n’avons pas le temps de tout explorer, mais le peu que nous voyons nous subjugue.

Il est déjà temps de se diriger vers la gare en passant par Arsenalna, la station de métro réputée la plus profonde du monde, à près de 105 mètres sous terre. Il faut pas moins de 4 minutes 30 pour atteindre les quais par deux escalators de suite.

Nous quittons la gare de Kiev dans l’unique petite voiture qui va jusqu’à Vienne. Elle est plus étroite et plus basse que les autres pour s’adapter au gabarit européen. Elle sera accrochée à trois trains différents et ses essieux seront changés à la frontière entre l’Ukraine et la Hongrie pour qu’elle puisse rouler sur les voies d’Europe centrale et occidentale qui sont plus étroites que celles de l’ex-Union soviétique. Il s’agit d’une voiture-lit qui rappelle le charme désormais désuet de la grande époque où les trains de nuits sillonnaient l’Europe. Nous avons deux cabines, une de deux personnes, une de trois, avec chacune un lavabo et une prise électrique ! Presque le grand luxe. La campagne ukrainienne est triste sous la pluie. Le train file vers l’Est et nous atteignons Lviv à la nuit tombée. Sous la grande verrière à l’européenne qui couvre les quais, l’odeur du charbon des samovars envahit les narines. Notre voiture est accrochée à un autre train.

Chop est la gare frontière. Le contrôleur nous réveille pour un rituel que nous connaissons maintenant : douaniers et gardes frontières ukrainiens font irruption. A nouveau une fouille en règle de nos sacs, puis un autre douanier arrive avec un poinçon et l’enfonce dans toutes les couchettes en le reniflant à chaque fois. Suspicieux, il revient un peu plus tard avec un collègue et tous les deux s’acharnent sur tout ce qu’ils peuvent trouver de rembourré dans notre cabine. Au bout d’un quart d’heure, ils ressortent en sueur, bredouilles, en nous remerciant poliment pour notre patience… Pendant ce temps là, les bogies de notre voiture sont changés : la caisse de la voiture est maintenue en l’air grâce à des vérins le long de la voie pendant que les bogies européens sont glissés dessous après avoir évacué les bogies ukrainiens. Les rails sont doublés afin de permettre la circulation avec les deux types de bogies. Nous pouvons repartir avec nos passeports tamponnés jusqu’à Zahony, la gare frontière hongroise à quelques kilomètres où nous sommes accrochés à un train slovaque (bien qu’à aucun moment, notre train ne traverse la Slovaquie). L’entrée en Hongrie ne pose pas de problème ; comme pour la sortie d’Ukraine, personne ne réveille les enfants et leur cabine n’est pas fouillée. Ils ne s’aperçoivent de rien et peuvent dormir tranquille !

Le soleil se lève sur les plaines de Hongrie. Nous n’avons toujours pas encaissé le décalage horaire et sommes donc encore matinaux. Par la fenêtre, on voit les villages s’activer, les gens vont au travail, en voiture, à vélo ou à pied, le long de la voie. Le train arrive à Budapest, puis ce sont les rives du Danube, les vastes plaines pelées et leurs éoliennes sous le soleil et enfin Vienne. Le train entre dans la Hauptbahnhof, encore neuve et le contraste avec notre vielle voiture ukrainienne est flagrant. Depuis que nous avons quitté Dubai, notre escale à l’aller, il y a près de trois mois, c’est le premier lieu que nous connaissons déjà. Il n’y aura désormais plus de contrôle aux frontières, on paye en Euros, l’heure est la même que celle de Paris, la langue est familière et le temps est de saison pour nous. En posant le pied sur le quai, on sent que c’est un peu la fin du voyage…

Vienne

Vienne est baignée de soleil en ce doux après-midi de septembre. Pas un nuage dans le ciel, les touristes se pressent au Palais de Schönbrunn et nous avec..

Tout est bien organisé pour une visite cadencée des appartements et des bureaux de l’Empereur François-Joseph et sa célèbre épouse Sissi. Ici, pas de queue, pas de bousculade. Ça nous change du Kremlin. L’heure sur le ticket est indiquée à la minute près, les audioguides, gratuits et débités à la chaîne permettent de rythmer la visite et éviter que les visiteurs ne s’éternisent dans les salles aux lambris d’or et à la porcelaine raffinée. L’empereur François-Joseph était un travailleur acharné et disait que tout le monde devait travailler jusqu’à l’épuisement. L’Impératrice aimait beaucoup voyager et ne passait pas beaucoup de temps au palais même si son époux disait être fou amoureux d’elle. On imagine les repas de famille autour de la grande table de la salle à manger, dressée comme si la famille impériale allait s’attabler d’une minute à l’autre. La grande galerie dorée et ornée de lustres à souhait a servi aux discussions entre Kennedy et Khrouchtchev au début des années 60. Des lieux chargés d’histoire où on devine à travers le raffinement des salles et les cartes exposées à certains endroits toute la puissance de l’Empire Austro-Hongrois des Habsburgs. Dans une des salles, une galerie de portraits de tous les enfants de l’Impératrice Marie-Thérèse, dont Marie-Antoinette.

Le musée des enfants, dans une des ailes du palais est en revanche complètement déserte. Pourtant, la vie des princes et princesses enfants y est présentée sous toutes ses facettes pour intéresser les enfants, comme on sait si bien le faire dans les pays germaniques. La journée-type, les repas, les jouets, les leçons, tout est détaillé dans une enfilade de salle très bien décorées.

Dehors, le parc est magnifique, inondé de la lumière de l’après-midi finissante. Après un petit tour au labyrinthe végétal et à l’aire de jeux, nous gravissons la pente vers la Gloriette, majestueux pavillon sur une colline faisant face au Palais. La vue sur les jardins, Schönbrunn et Vienne derrière y est magnifique. Des visiteurs de tous les pays sont assis sur l’herbe et contemplent la vue, on entend parler toutes les langues. Quelques coureurs profitent également de la douceur des températures. Le soleil a disparu derrière les arbres de la colline mais quelques rayons découpés par les nuages subsistent et donnent aux statues une teinte légèrement dorée. Les marchands de glace ramènent en triporteur ce qu’il reste de leur marchandise. C’est l’heure de rentrer pour nous aussi. Le métro est presque aussi propre et bien entretenu que celui de Tokyo, en moins étroit. Il est 21h, l’heure de se coucher pour notre dernière nuit du voyage.

Après un bon petit déjeuner à la gare, nous embarquons à bord de l’ICE (le TGV allemand) à destination de Francfort. Plus de compartiment, plus de samovar, plus de provodnitsa. Les sièges sont confortables et le Wi-Fi permet de se connecter à l’Internet ou de regarder un des films proposés à bord. Le train démarre et file à travers la campagne de Basse Autriche. En un peu plus de trois heures, nous avons traversé le Danube et sommes en Bavière. Les collines où se serrent les maigres et hauts conifères alternent avec les champs de maïs ou les pâturages. Les clochers à bulbe, typiques du sud de l’Allemagne sont plantés au milieu des villages. La voie longe et traverse le Danube à plusieurs reprises. Après Ratisbonne, Nuremberg et Wurzbourg, notre train arrive à Francfort, dans l’immense gare grouillant comme à son habitude de gens de tous les coins du monde. Derrière, on aperçoit les gratte-ciel de la capitale de l’Euro. Nous ne restons qu’une heure, juste le temps de manger une saucisse et d’acheter deux Ritter Sport, les célèbres tablettes de chocolat fourrées, vantées à force de grands panneaux publicitaires partout dans la gare.

Le TGV pour Paris se remplit à Mannheim et Karlsruhe et nous traversons le Rhin au soleil couchant. L’écran affiche 307 km/h et on se dit qu’on est bien loin des 80 km/h du début de notre voyage quand nous longions le Pacifique au départ de Vladivostok. Il fait nuit noire quand nous approchons de Paris et en sortant du train, nous voyons les premières affiches publicitaires en français depuis douze semaines !  Dans le métro ligne 4, les gens viennent de partout, on entend parler différentes langues. Comme Tokyo, Séoul ou Moscou, Paris est aussi une grande capitale…